Convocation en famille [PV Babar/Début aout 96]

Avoue à contre coeur:

"- Je me suis opposée ouvertement à mes parents. Ils pensent que le professeur Dumbledore en est responsable."

Il apparaissait clairement, maintenant, que tenir tête à ses parents n'était nullement une preuve de courage ou de force de caractère, mais bien l'acte inconsidéré d'une petite fille capricieuse. Ce qui était loin de lui plaire.

Hm.

Nathaniel se fit pensif un instant, puis finit par dire :

Je ne m'en ferais pas pour ça, si j'étais vous. Votre inscription ne sera pas annulée. Certainement pas par le professeur Dumbledore ; quant à vos parents, ils n'y peuvent plus grand chose.

Passe comme si c'était anecdotique et reprend un peu plus loin dans la conversation.

Le journalisme est un métier passionnant, qui requiert débrouillardise et extrême subtilité. Il s'agit une école personnelle en premier lieu. Je vous conseille d'user de cette dernière année à Poudlard pour pratiquer.

Il souriait, comme s'il s'agissait d'une conversation positive et joyeuse.

Paralysée par tout ce qu'impliquaient les propos du ministre, Naomah en resta pantoise un instant. ça ne pouvait pas être aussi simple. Si?
Non, impossible.
Se rendre à Poudlard à la rentrée alors que ses parents le lui interdisaient... Ce qui signifiait s'échapper bel et bien du manoir familial, trouver le moyen de rejoindre l'école, puis de survivre en sachant que plus jamais elle ne pourrait remettre les pieds chez elle...
Dans ce bureau, ça semblait faisable, mais elle savait très bien que dehors, elle serait seule contre ceux auxquels elle tenait le plus, et qu'il n'y aurait personne pour l'aider.
Sous le coup de la panique, elle se leva. il fallait qu'elle fasse quelque chose, et c'était tout ce qui lui était venu à l'esprit.

"- Je... Je dois y aller..."

D'une manière que certains pourraient qualifier d'agaçante, le Ministre émit un léger rire, à peine distinct.

Vraiment ?

Il leva les yeux vers la jeune fille.

Est-ce ainsi que vous affrontez l'inconnu ? En fuyant plus loin encore ?

Il souhaitait la pousser dans ses retranchements, tester ses limites et surtout, enseigner.

La fierté titillée, Naomah réagit en s'empourprant joliment.
Elle joua les poissons hors de l'eau quelques instants, puis lança, avec un mélange de vexation et de panache dilué dans une bonne dose de jelly.

"- C'est bien facile de dire ça, pour vous. Tout à l'air tellement simple à vos yeux. Pour moi, rien ne l'est!"

La raison en est simple.

Il la fixa intensément.

Il vous faut grandir. Pause. Acquérir de l'expérience. Nouvelle pause.
Et surtout, apprendre à être patiente.

"- C'est ce que j'essaye de faire..."

Un peu provoque, et à deux doigts de tirer la langue pour accompagner le tout.

"- Mais tout le monde a l'air décidé à me dicter un comportement bien différent."

Barker pointa son doigt vers la jeune fille et le remua légèrement en souriant. Il y arrivait doucement.

Exactement.

Il reprit son air imperturbable.

Et qui allez-vous choisir d'écouter ?

Surement aurait-elle répondu "personne" au début de cette journée. Mais il faut croire qu'elle était bonne élève.

"- Vous, bien sur."

Sauf que le regard un peu sur l'œil qu'elle lui jetait en guise d'accompagnement révélait un peu trop le fond de sa pensée. Elle disait ce que l'autre préfèrerait entendre. Mais pour sa part, elle avait juste besoin de réfléchir à tout ça. Et il n'y avait pas grand monde pour lui imposer sa façon de penser.

Nathaniel laissa s'échapper une lueur de déception dans le regard. Il n'y était pas encore. Mais cela viendrait sans doute, s'il devenait son "tuteur".
Il baissa le visage un instant, laissant apparaître furtivement un bout de sa cicatrice au coin de la joue.

Mauvaise réponse, se contenta t'il de murmurer à son égard.

Mais votre décision reste la meilleure.

Il releva l'oeil sur elle.

Miss, je vous propose la chose suivante, pour commencer. Je vais vous renvoyer auprès de Mr Milo, auquel vous donnerez l'information suivante.

Il lui répéta alors en quelques mots brefs la raison pour laquelle ses parents étaient accusés de côtoyer de trop près Voldemort. Que Prewett le sache ou qu'elle l'ignore, peu importait. Elle n'aurait qu'à apporter cette preuve, strict nécessaire à la poursuite de l'enquête sans qu'elle ne soit plus impliquée dedans.

Par la suite, je vous conseille de reprendre la vie que vous meniez jusqu'ici, avec intelligence. Observez, écoutez et forgez-vous.

Il n'aimait pas donner de leçon aussi directe, mais il ne lui restait plus beaucoup de temps avant la fin de cet entretien et il était important que la jeune fille l'écoute attentivement.

Nous nous reverrons en septembre.

Voilà qui venait conclure son petit monologue.

Détacher son attention du bout de cicatrice furtivement entraperçu ne fut pas chose aisée, mais le sérieux de la situation eu raison de sa fascination.
Elle ne ferait rien de ce qu'on lui dirait de faire, voila la résolution qui l'animait alors qu'elle écoutait, toujours tendue comme une flèche prête à être décochée.
Ou peut-être que si... Les conseils proférés eurent, encore une fois, le don de l'ébranler dans ses certitudes. La voie tracée lui apporta réconfort, comme si on l'autorisait à parler sans plus de craintes.
S'ils savaient déjà tout ce que le ministre lui disait de répéter, le crainte de trahir sa famille n'avait plus lieu d'être. Et en ça, elle était reconnaissante au ministre.
Suffisamment pour poser la question qui lui importait vraiment:

"- Ceux qui ont la marque."

Elle porta le regard dans un coin de la pièce, clairement mal à l'aise et sur le point de dire quelque chose qu'elle sait ne pas devoir dire.

"- Vous allez les tuer?"

Son regard se posa sur le Barker, défiant.
Autant dire que de sa réponse dépendrait une décision importante de Naomah concernant Barker. Son grand frère venant de recevoir la marque, elle avait de quoi craindre pour lui.

Barker ne s'attendait pas à cette question. Pourtant, en l'analysant, il aurait du la prévoir de la part de la jeune fille. Serein, il resta imperturbable dans son attitude mais le ton de sa voix se fit plus emprunt d'humanité :

Les tuer ?

Il posa un regard plus doux sur l'adolescente bien qu'il aborde en quelques sortes une question politique capitale :

A quoi cela pourrait-il servir le gouvernement ou moi-même ? Ils seront emprisonnés, sans aucun doute, Miss. Mais les plus raisonnables auront droit à une seconde chance, si leur Maître ne les tue pas avant. Car là réside tout le problème. Les emprisonner, c'est aussi les protéger du fou qui les gouverne, eux.

Sa réponse lui apporta plus de soulagement qu'elle ne l'aurait cru possible. A tel point qu'elle sembla grandir tout à coup, déchargé d'un poids immense.

"- Merci pour cette réponse, Monsieur le Ministre!"

Allez savoir pourquoi, elle était à deux doigts d'être toute guillerette. Non pas qu'elle soit sur le point de révéler que son frère avait déjà la marque... Voila un point sur lequel elle savait ne pas pouvoir s'exprimer sans commettre quoi que ce soit d'irréparable. Mais pour la première fois de sa vie, il lui avait semblé être confrontée à une réaction sensée.
Alors qu'elle regardait Barker, un petit sourire aux lèvres, un peu plus et elle l'aurait serré dans ses bras si elle n'y prenait pas garde.
Enfin, tout ça, c'était avant qu'elle remballe son attirail "toute contente" et qu'elle conclue d'un

"- Non pas que ça me concerne... Mais c'est toujours bon à savoir"

aussi sérieux que possible.
Occupée à lisser sa robe, elle contempla ses pieds quelques instants. Quand elle releva les yeux, c'est avec toute la sincérité du monde qu'elle se prononça:

"- Merci. Je n'oublierais pas ce que vous m'avez dit."

ça, au moins, elle pouvait l'affirmer.

Noa a écrit:- Non pas que ça me concerne... Mais c'est toujours bon à savoir

Nathaniel ne retint pas la pointe d'ironie qui fit surface. Il était d'ailleurs bien rare qu'il le fasse :

Bien entendu.

Il vint se placer face à elle, lentement, sans la quitter des yeux.

Je n'oublierai pas vos paroles non plus.

Il la fixa avec plus d'intensité encore, comme s'il attendait un retour. Pourtant, il n'y avait pour lui aucune attente derrière ces mots et cette attitude, mais la simple envie de le faire croire.

Sous le phare de ce regard, la miss baissa les yeux, incapable de maintenir la moindre expression sans se sentir en porte à faux.

"- Voila qui est très intimidant... J'espère n'avoir pas dit trop de bêtises."

Avec ce mélange de sérieux difficilement établi (et bien souvent par la force des choses), de grâce naturelle et d'exubérance retenue à grand peine qui la caractérise, Naomah tendit une main volontaire, et de guingois à la fois, au ministre.
Illustration parfaite de cette attitude, ses cheveux coupés courts ne parvenaient qu'à grand peine à lui donner son âge face à l'innocence certaine que dégageaient sa frimousse de rousse et ses grands yeux bleus.
Dire qu'elle n'était pas consciente de cette impression qu'elle laissait serait mentir, d'autant plus qu'elle en jouait à l'occasion. Qu'elle craigne pour sa famille et son avenir n'y changeait rien, au contraire. La peur aidant, son insouciance frivole habituelle avait cédée le pas depuis longtemps à un instinct de survie on ne peut plus efficace. Or il lui dictait, en l'instant, de dire tout ce qui lui passait par la tête, tout ce qu'elle avait sur le coeur, certaine qu'un jour ce lui serait utile.
Difficile de cacher, dans ces conditions, tout l'espoir qu'elle plaçait en Nathaniel Barker, et qu'elle lui en était reconnaissante.
Acte qui pourrait sembler enfantin s'il n'était prononcé par une jeune femme en devenir, Naomah s'avança sous le nez du ministre, l'air plongée dans ses pensées, à la recherche des mots qu'elle s'apprête à prononcer.
Quand elle fut enfin capable de s'exprimer comme elle l'entendait, elle s'arrima à ses croyances les plus intimes, et prononça cet étrange serment, yeux remontés sur ceux du vampire:

"- Quoi qu'il en soit, voici quelques mots dont la valeur est pesée avec soin: Peu importe ce que ça implique, je trouverais le moyen, celui-là même qui semble hors de portée des mangemorts comme du ministère, de permettre à tous de s'entendre. Puisqu'il semble que ce soit le seul moyen pour ma famille et moi de retrouver notre vie."

Ce vœu avait tellement d'importance à ses yeux, qu'elle dut froncer légèrement les sourcils et pincer les lèvres pour empêcher un afflux d'émotions de la submerger. Naomah ne souhaitait surtout pas révéler la moindre faille. Pas à ce stade.
Qu'on ne s'y trompe pas. Elle ne savait toujours pas ce qu'on attendait d'elle, ni ce qu'elle devait faire. De toute façon, elle n'avait pas du saisir le quart des indications que lui avait donné Barker, ni même perçu leur impact.
Mais qu'à cela ne tienne! Elle trouverait. Ou pas.

"- Quand ce sera fait, je reviendrais vous voir. Vous aurez intérêt à m'écouter."

Prophétie ou requête aux accents de l'enfance gâtée? Entre les deux, ma bonne dame. Avec un soupçon d'interrogation en prime. C'est qu'elle ne souhaitait pas partir sans avoir la moindre assurance de revoir le ministre un jour.

Nathaniel perçu un changement brutal et profond de l'atmosphère dès lors que la jeune fille s'approcha de lui. Il ressenti soudain une extrême difficulté à la regarder, à l'écouter, tant ses pensées se figèrent sur son "odeur". Il la regardait mais il ne voyait plus que ses veines parcourir son visage, palpiter le long de son cou et de cette main qu'il tenait encore dans la sienne. Elle s'ouvrait à lui, lui offrant sa confiance et ses espoirs, créant ainsi un lien indicible entre elle et le vampire. Ce qu'elle disait n'avait aucune importance, encore des mots enfantins et naïfs, si bien que Barker ne comprenait pas cet élan instinctif et soudain qui s'emparait de lui. Il pouvait la posséder, en cet instant plus qu'à n'importe quel autre, car il en ressentait l'irrépressible envie.
Le vampire dû rassembler toutes ses capacités intellectuelles et sa force mentale pour ne pas céder à cette tentation irraisonnée. Cela ne lui arrivait pas souvent, mais à chaque fois, il lui semblait qu'il n'avait jamais eu à affronter d'épreuve plus difficile.

Pas encore ! lui soufflait sa conscience.

Une lueur mauvaise, de prédateur, passa dans son regard alors qu'il le détachait d'elle un instant. Le parfum de son sang était enivrant, douceur métallique aux promesses de saveurs exquises. Il l'avait su, dès qu'il l'avait sentie ce jour là, à Pré-au-Lard. Mais jusqu'à présent, son envie s'était contentée de se montrer sage, patiente. Il voulait d'abord découvrir ce qu'il y avait derrière, ce qu'elle pouvait devenir à ses côtés. A présent, le lien qu'il avait instauré se resserrait en un étau suicidaire. Il lui fallait conserver son esprit rationnel.

Noa a écrit:Vous aurez intérêt à m'écouter.

Lorsqu'il posa de nouveau l'œil sur elle, la puissance de sa pulsion s'était évanouie. Il n'en restait plus qu'un goût amer et pesant, en arrière plan de ses pensées.
Lentement, il relâcha son étreinte un peu trop marquée sur la main de la jeune fille et la fixa avec une intensité qui la mettrait mal à l'aise, envoûtante. C'était facile pour lui, mais cette fois il était bien décidé à ne lui laisser que peu de chances de s'échapper. Si elle ne rompait pas ce contact visuel rapidement et si ses sentiments envers lui étaient bien ceux qu'il devinait, il l'aurait à sa merci, capable d'insuffler en elle un sentiment de fascination profond et inconscient.
C'est presque dans un murmure qu'il prononça en même temps ces mots :

Nous aurons l'occasion de nous revoir bien avant, Miss. Ce jour là aussi, je vous écouterai.

Le vampire resta plongé dans les sensations de la jeune fille jusqu’à ce que celle-ci se libère de lui. Ses yeux avaient vu au-delà de ce que les humains peuvent voir. L’espace d’un instant, Nathaniel avait parcouru des bribes de pensées et de sensations appartenant à Naomah. Bien entendu, il ne les percevait pas comme s’il avait parcouru un livre ouvert, piochant là où il le désirait. Il n’avait le pouvoir de percevoir que ce qui lui était donné sur le moment. Et c’est cette simple capacité qui lui permit de déceler l’inutilité d’user du Charme dont il était pourvu. La jeune fille ressentait déjà ce qui la ramènerait à lui : la fascination.
Il la laisse donc s’échapper sans regrets et sans craintes, bardé de la certitude qu’un jour, elle lui appartiendrait.

A ses mots, il se contenta de sourire légèrement afin de marquer l’ironie :

Sans doute, oui.

Il s’appuya sur sa canne en faisant un pas sur le côté, traçant un chemin allant vers son bureau.

On vous aurait plus probablement soupçonnée de vendre vos parents pour vous épargner vous-même. C’est gallion courant de nos jours.

L’homme sourit de nouveau, plus pour lui-même cette fois.
C’est sobrement qu’il conclut définitivement cet entretien.

A bientôt, Naomah Prewett. La prochaine fois, tâchez de vous montrer plus raisonnable et de ne pas faire déranger le Ministre par caprice.

On n'aurait su dire s'il s'agissait d'humour grinçant ou de sérieux, et Nathaniel ne donna aucun indice supplémentaire.

s'il avait voulu lui arracher un sourire timide et contrit, voila qui était réussit. Consciente d'avoir quelque peu dépassée les bornes en exigeant de lui parler, Naomah en rougit même légèrement sous ses tâches de rousseur.
Ce qui ne l'empêcha pas de continuer à agir comme elle seule savait le faire:

"- Je ne sais comment vous remercier pour avoir accepté de me recevoir..."

Un peu plus, et elle aurait déposé une bise sur sa joue. Mais oser un tel acte serait pure folie, n'est-ce pas?
C'est pourtant ce qu'elle fit. Avec toute la délicatesse d'un oiseau se posant sur une brindille.
Une chose était sure: elle pensait chaque miette de son geste, et en irradiait encore alors qu'elle s'éloignait.
Le moment de partir était venue, semblait-il.

"- C'était un grand honneur." Conclut-elle, candide.

S'il était une chose à laquelle Nathaniel n'avait jamais été habitué au cours de son existence, c'était bel et bien ce qu'il appelait "une attitude familière". Généralement, lorsqu'on se risquait à l'approcher d'un peu trop près, on y perdait au moins un bout de ses ailes. Si bien qu'il considérait comme normal le fait que cela ne vienne même pas à l'idée d'autrui.
Alors, lorsque la jeune fille s'approcha de lui pour déposer un baiser sur sa joue, il ne réagit pas, telle une statue de fer indifférente à toute surprise ou sensation. La surprise, pourtant, était grande. Mais ce n'est pas là le sentiment auquel il s'attarda.
La jeune imprudente avait réveillé ses sens de plus belle, laissant des empruntes de son odeur partout autour de lui, contre sa peau même. S'il n'avait été qu'un simple vampire, il l'aurait sans doute anéantie sur le champ, incapable de résister à cet appel charnel des plus délicieux. Mais sa condition d'hybride faisait de lui un être capable de ne pas s'attarder sur ce genre de chose, en général... Aussi, sa réaction première ne fut que peu prudente : il se saisit brutalement de l'épaule de la jeune demoiselle alors qu'elle parlait d'honneur, afin de l'empêcher de regagner une distance de sécurité et dans l'hésitation.

Son mental flanchait, si bien à cause de l'offense qui venait de lui être faite, que pour cause d'un désir intense et irrépressible. Il sentit sa lèvre supérieure se retrousser légèrement, sans laisser apparaître ses crocs saillant. Son corps avait commencé à ne plus lui répondre en permettant à ses dents de vampires de sortir, mais il lui fallait reprendre le dessus.
L'espace d'un instant, il perçu l'inquiétude de Naomah de le voir ainsi statufié dans une position de prédateur. C'est ce qui le rendit capable de sortir de son fantasme pour répondre dans un murmure aux allures menaçantes :

Evitez de me remercier à l'avenir, Miss.

Il la relâcha d'un geste très lent, mâchoire serrée alors qu'il revenait doucement à lui. Puis il s'écarta d'elle prudemment, ne cessant de la fixer de son oeil perçant. Sa voix, pourtant, était redevenue douce et velouté. Il fallait faire taire en elle les battements de son coeur soudain sous l'emprise d'une forte émotion :

Je n'apprécie guère les épanchements en tout genre, rien de personnel.

Il reculait toujours en la regardant, mais cette fois il sourit poliment.
Comme on pourrait s'adresser à un gentil garnement :

Filez.

Yeux grands ouverts sous le coup de la frayeur, Naomah fixa Barker en retour. Elle avait senti le danger, à plein nez même, mais au lieu de le fuir (attitude habituelle) elle resta hypnotisée, à écouter le doux chant des sirènes.
Inquiète de ne pas savoir ni comprendre ce qu'il se passait, elle tenta de se libérer de l'emprise, en vain et sans jamais aller jusqu'à se débattre. L'idée ne lui serait même pas venue à l'esprit. A quoi bon chercher à s'enfuir pour de bon quand on se trouve en présence de la seule personne qui semble disposée à vous aider?
Il n'y a que quand on flaire un piège qu'une telle réaction est envisageable, ce qui n'était pas le cas pour Naomah.
La menace dans l'air la rendant incapable de mensonge ou de calcul, Noah répondit sans même réfléchir, dans un murmure:

"- J'essayerais..."

Amusant comme son repentir lui donnait un air un peu revanchard pas crédible du tout, et pour cause, elle s'en savait incapable. Le tout était appuyé par le ton de sa voix, parfaitement pas convaincu.
C'est qu'on ne l'empêchait pas de faire ce qu'elle voulait. Pas si facilement, en tout cas. La frayeur devrait être plus intense, et ne plus lui plaire, ce qui était loin d'être le cas pour l'instant.
Révélant par là-même toute l'ampleur de son côté pas farouche, Naomah ne fila pas tout de suite quand on lui en donna l'ordre, restant quelques instants à fixer Nathaniel d'une façon un peu trop insistante avant d'obéir, à contre coeur.

"- Plus de caprice," acquiesça-t-elle, à retardement, juste avant de fermer la porte pour de bon.

Voila qui faisait une drôle de conclusion. Mais une conclusion quand même. Une fois dans le bureau de la secrétaire, elle disparut rapidement, s'égaya comme un oiseau dans un rayon de soleil.