Loup, qui es-tu?

L'écho d'un pas déséquilibré retentit dans les couloirs voisins. Ainsi s'annonçait la venue du nouveau ministre, à présent.
Nathaniel, paré de vêtements anciens parfaitement taillés et élégant, marchait aux côtés d'une secrétaire et d'un conseiller, observateur. Sa canne claquait sur le sol tandis qu'il boitait en direction du lieu de rendez-vous. Sur son visage, on ne percevait qu'un stoïcisme naturel. Non loin d'afficher une expression hautaine, il souriait cependant du coin des lèvres comme pour prouver son aise.
Lorsqu'il découvrit le journaliste, il ne pressa ni le pas ni ne se fit plus souriant. Il se contenta de l'observer poliment et de lui offrir un signe de tête afin de le saluer. C'est à l'arrêt qu'il lui tendit une main gantée en faisant résonner le timbre à la fois grave et doux de sa voix :

Bienvenue au Ministère de la Magie, Monsieur Malloy.

Il marqua une pause en récupérant sa main afin de la poser de nouveau sur sa canne.

Si vous voulez bien me suivre.

D'un geste élégant, il désigna l'entrée de son bureau puis précéda l'invité. En passant, il fit signe à la secrétaire, lui annonçant de ne le déranger que pour affaire importante.

Le bureau de Barker n'était pas de ceux qui vous en mette plein la vue. De nature très sobre, il était composé d'un mobilier ancien et précieux, à l'image de son propriétaire. Ça et là, gisaient quelques objets de collection bien que la plupart ne représente valeur qu'aux yeux du Ministre. Une longue bibliothèque recouvrait l'un des murs, avec en son sein des centaines de livres venus du monde entier.
Nathaniel Barker pris place dans l'un des deux fauteuils en velours qui faisaient face à son bureau. Ainsi, il ne se plaçait pas en position de supériorité face au journaliste qu'il accueillait en son antre. Au contraire, il souhaitait nouer un contact plus intimiste, plus humain.
D'un geste courtois, il pria Malloy de s'assoir auprès de lui. L'homme à l'allure recroquevillée lui paraissait déplacé. C'était la raison précise pour laquelle il l'avait choisi. Ce journaliste de peu de renom était connu pour ses côtés décontracté et insolent. Ce caractère plaisait à Barker. Pour une fois, il n'aurait pas à répondre à l'un de ces journalistes bienséant que le Ministère choisi précieusement pour éviter les remous. Il s'agissait là d'un risque qu'il était prêt à assumer.

Après lui avoir laissé le temps de parcourir la pièce et de s'en faire une idée, il lui expliqua avec parité :

Sentez-vous libre de mener cette entrevue tel que cela vous convient, Monsieur Malloy. Je vous laisse ouvrir la voie.

Les mains posées sur les accoudoirs, il se tenait droit et à son aise, prêt à répondre à toute interrogation. Son visage ne laissait paraître qu'une expression sereine, agréable.

Occupé à regarder les titres des différents ouvrages, le journaliste accueillit l'invitation du ministre d'un coup d'oeil en coin à peine marqué:

Hmmm? Hmm...

Poum poum poum... Et un petit hochement de tête histoire d'accuser réception avec sobriété. Ce genre de proposition n'était pas monnaie courante dans la classe politique, mais Christian n'en montra rien. Petit à petit, il accumulait les données nécessaire à l'écriture de ce qu'il estimait comme un bon papier. Finalement, il revint vers le centre de la pièce, farfouillant distraitement dans ses poches avant d'en sortir son calepin et sa plume à papote.
D'un geste, il montra la bibliothèque:

Joli présentoir que vous avez là. De quoi impressionner son monde.

Puis il posa le bloc ouvert sur le bureau et mis sa plume en équilibre. Au contraire de celle de Rita Skeeter, cette dernière ne semblait pas particulièrement éveillée et resta immobile. Lui-même restait debout, continuant de fouiller dans ses poches, jusqu'à en sortir un paquet de cigarette. D'un geste, il en proposa une à Barker.

En effet.

Barker déclina la proposition du journaliste d'un simple geste, mais ne montra aucune gêne à ce que Malloy fume. Il continuait de le rôder alors que doucement se présentaient à lui quelques constats sur le personnage qui lui faisait face. Sourire en coin, à peine visible, il montra la bibliothèque du bout des doigts.

L'ignorant se laisse impressionner par ce qu'il ne connait pas. L'envieux désire posséder pour impressionner. L'ignorant envieux, lui, est le plus à plaindre, car il pense impressionner en possédant ce qui n'a aucune valeur.

Il rit à peine, comme s'il était le seul à pouvoir comprendre le sens de ses mots. Là se jouait tout le mystère Barker, autour de cette aura qui l'entourait à l'instant présent : insaisissable.

Sans gène, le journaliste se cala au fond du fauteuil, pieds bien à plat par terre, et, une fois sa cigarette allumée et un grand nuage de fumée déployé dans la pièce, il posa les bras sur l'accoudoir.
Dans un premier temps, il écouta avec attention ce que lui disait Barker, le regardant par en dessous de son air de vieil ours qui a cru entrapercevoir le dorée d'une tranche de miel. Mais très vite, il décrocha et se gratta la tête, l'air de ne pas avoir compris grand chose et de ne pas en être très content.

Et ça vous situe où tout ça?

Pendant ce temps, la plume commença de s'activer, notant quelques mots et remarques du genre de "fait des grandes phrases qui n'ont rien à voir avec ce qu'on lui demande" "prudent" "détourne à son avantage" "aimable et discret" ... Il n'y avait pas de grandes envolées lyriques avec cette plume là. A l'image de son propriétaire, elle était sobre et réservée.

Barker sourit.

En simple féru de lecture et de savoir.

Il ne prêta aucune attention à ce que la plume pouvait écrire mais continuait d'observer l'homme qui lui faisait face d'un oeil attentif. S'il était une chose inconnue à Nathaniel, c'était bien celle de montrer un quelconque jugement sur autrui lors d'un première rencontre. Connaître une personne et la cerner prenait du temps. Lui, plus que quiconque, en avait conscience : les rôles sont faciles à jouer.

Connaître l'Histoire du monde dans lequel on vit pour le comprendre et le faire évoluer au mieux est ce que j'estime être la base d'un politicien. Trop peu sont ceux qui s'en soucient réellement, malheureusement.

"Un simple féru de lecture et de savoir". Immédiatement, la citation apparut sur le parchemin. Comme toujours, le journaliste réceptionna l'info avec son froncement de sourcil pouvant aussi bien signifier qu'il avait une mal au ventre soudain, qu'un mécontentement profond. A dire vrai, il ne pensait pas grand chose pour le moment, si ce n'était qu'il n'avait pas là matière à écrire quoi que ce soit d'intéressant. Mais la rencontre ne faisait que commencer.
Tentant une première fois, sans succès, de s'exprimer, l'homme s'éclaircit la gorge et reprit une seconde fois.

- "Vous voulez dire que parfois, entre deux réunion, vous vous posez tranquillement dans votre bureau, choisissez un livre dans votre bibliothèque, et le bouquinez ...?"

Peut-être l'incrédulité faisant plus que percer dans le ton de sa voix n'était-elle pas bienvenue, mais il fallait avouer que le discours du ministre ne lui semblait pas très franc.

Il émit un petit rire de gorge.

Je savais déjà lire avant d'être Ministre.

Coupant court à ce brin de sarcasme, il reprit plus sérieusement afin de répondre avec justesse.

Je n'ai pour l'instant que peu de temps pour moi, mes nouvelles fonctions nécessitant une part considérable de travail. Aussi, ces livres ne me servent qu'à vérifier certaines informations géopolitique, en général. Néanmoins, j'ai effectivement pour habitude de me reposer l'esprit au travers de la lecture, bien que cela puisse sembler suspicieux à certains. Il s'agit d'une détente qui m'est propre et nécessaire. L'humain, le monde et son Histoire me passionnent depuis l'âge le plus tendre. Le savoir est un cadeau que l'on se doit de s'offrir. De tout ceci découle sans doute mon choix de tenir un rôle dans la politique.

Barker savait qu'il s'agissait là de sa première entrevue avec la presse. C'est pourquoi il jugeait nécessaire le fait de parler de son sincère intérêt pour son métier et d'en parler longuement. D'ordinaire, il n'était pas si avenant. Or, on lui avait donné une chance incommensurable de faire changer les choses en exerçant le poste le plus haut placé de l'Angleterre et il comptait en profiter pour établir un ordre nouveau.
Il avait cependant conscience du "déjà-vu" que représentait son discours et se promettait de ne pas tomber dans un cliché trop inconvenant à son image. Il lui fallait pourtant établir une relation de confiance avec le peuple sorcier et pour cela, ne pas s'écarter de trop loin des sentiers battus. Les choses changeraient petit à petit, il s'en chargerait.

Scusez ma maladresse

Il se frotta encore une fois la barbe, pas vraiment l'air désolé. Il avait plutôt l'air embêté.

C'est qu'on n'est pas habitué à avoir des gens qui prennent le temps de lire par ici. Paraîtrait que ça nuit à l'action, ce genre là quoi...

De la main, il fit un signe pour illustrer l'aspect aléatoire de sa remarque.

Paraîtrait même que Fudge était du genre à prendre ses décisions à pile ou face.

ça, il semblait un peu plus prêt à y croire, et pour le coup, voila le gars lancé et qui accélère le débit de parole en même temps qu'il se dresse un peu.

Enfin, ça, pour ce que j'en dis... il y a sans doute pas mal de bêtises qui se disent aussi... Vous allez voir qu'on va pas tarder à dire que vous faites pas grand chose à part vous empoussiérer le nez dans vos bouquins... Et à leur décharge, faut bien avouer qu'on en a déjà eu des exemples de grands penseurs idéalistes et forts de leur connaissance du passé et du monde. En général, ils valaient pas tripette. Trop occupés loin des réalités.

Voila, le journaliste avait conclue sa tirade. Il se cala un peu plus dans son siège, regardant le ministre par en bas. Sur ce coup là, il savait avoir envoyé du lourd, et il s'attendait plus ou moins à un rire un peu moqueur pour cacher la nervosité.
Quoi qu'il en soit, la réaction valait souvent le détour.
C'est donc patiemment, et avec un petit air du genre "alors, vous en pensez quoi?", qu'il attendit une réponse.

Barker croisa les mains tout en écoutant les paroles du journaliste. Voilà enfin que se révélait ce pour quoi il était connu. Le Ministre n'en fut ni offensé, ni surpris. Au contraire, il avait presque attendu l'instant où les mots frapperaient. Et plus encore, il partageait cette opinion sous-entendue. Il répondit presque dans l'immédiat, du même ton calme et chaud :

J'ai la prétention de croire que je ne suis pas de ceux là. Les réalités du quotidien sorcier, et du quotidien moldu d'ailleurs, me préoccupent sérieusement. Ne serait-ce que pour mon bien-être personnel, je l'avoue.
Beaucoup d'hommes politiques sont nourris d'idéalisme plus que de réalisme, ou encore d'envie de pouvoir. Cela n'est pas mon cas. Je sais mon combat vain car un homme seul ne peut changer les choses. Pourtant, il peut initier une mouvance qui elle, entraînera une évolution. Ce qui est mon intention.
Peu importe l'image que les gens peuvent avoir de moi, l'apparence ne fait qu'ouvrir des portes ou en fermer. L'important est qu'ils se rappellent les idées. Une idée n'a aucun visage, mais elle peut faire changer les choses comme jamais on n'avait osé l'espérer.

(eh! Y a un bar dans l'coin? ou faut que je sorte ma flasque? tsss, si faut tout faire soi-même...)

N'en étant pas tout à fait arrivé là où il le souhaitait, mais sentant tout de même qu'il était arrivé quelque part, l'homme sembla tendre vers l'immobilisme un instant. Le regard braqué sur Barker, il haussa tout de même un sourcil étonné.

Des idées? Quelles idées?

Voila qui devenait intéressant, et ce à quoi il ne semblait pas préparé.

(On a le droit de draguer le journaliste ? )

Il songea un instant à la réponse que pouvait entrainer ce genre de question abstraite.

L'idée du possible comme celle de l'impossible. De l'idée peut jaillir un concept, un espoir, une union qui, elle-même, peut conduire au changement. L'important est la finalité, le chemin. Non pas l'instigateur.

Suite à une pause légèrement marquée, il permit de lui-même à Malloy de rebondir sur le sujet qui semblait l'intéresser, défiant toutes les lois de la langue de bois.

Cela répond t-il à votre question ou espériez-vous me voir détailler certaines de mes propres idées concernant le gouvernement sorcier ?

Un petit pli mécontent au coin des lèvres, Christian s'était impatienté tout le temps qu'avait duré cette réponse qui a son sens n'apportait rien. Il avait bien compris que l'homme ne voulait pas se mettre en avant, qu'il ne voulait pas le pouvoir, mais désirait seulement servir le peuple sorcier, comme un idéal désincarné, mais somme toute réaliste.

Un peu sec dans son ton et grincheux dans l'attitude:

Certes, ce dernier point m'intéresse un peu plus. Ne vous inquiétez pas

et sur ce point, l'ironie ne manquait pas de pointer son nez

Vous aurez le droit à un paragraphe conséquent sur le genre de dirigeant que vous souhaitez être et le positionnement qui est le vôtre.

sur ce point aussi, pas de langue de bois. Le journaliste était au courant du genre de contrat tacite qui existait avec les politiciens, et il l'acceptait toujours dans la mesure où il n'avait pas à mentir ou à jouer les idiots tombés sous le charme de son interlocuteur.

Mais en matière d'idée, je m'intéressais plus particulièrement à vos opinions plus ou moins personnelles. Notamment sur des points d'actualité, comme... Le raz de marée mangemort qui frappe à nouveau l'Angleterre, et l'inquiétude de tous ceux qui entretiennent des liens avec le monde des moldus.
Ce qui ne vous empêche pas d'aborder les opinions qui vous tiennent à coeur... Mais je dois avouer préférer vous entendre vous prononcer sur des considérations actuelles.

Sciemment, il adopta un ton convenu et poli, ressemblant étrangement à celui d'un agent du ministère:

Vous n'êtes pas sans savoir quel choc que fut l'assassinat du ministre Fudge et à quel point il est toujours très présent dans les esprits, tout comme les menaces qui pèsent sur certains de nos condisciples.

Une lueur de mépris fusa dans le regard de Barker alors que le journaliste tendait vers l'ironie, pour le quitter aussitôt. Il n'était pas n'importe quel politicien et à terme, il comptait bien le montrer.
Il ne perdit cependant ni sa patience, ni sa douceur malgré ses propos provocateurs :

Fudge n'était pas très malin. Il vivait non seulement avec des oeillères mais les portait avec fierté.
L'homme, face à ses plus grandes peurs, possède une incroyable faculté à occulter la réalité. Je suis de ceux qui s'y préparent et les affrontent.

Le ton se fit plus implacable :

Voldemort représente une menace bien réelle, puissante et organisée ; mais il ne me fait pas peur. C'est ainsi que la communauté devrait le considérer : comme un danger, mais pas invincible. Les mangemorts ne sont qu'une poignée de personnes, elles-mêmes effrayées par le monde qui les entoure. C'est pourquoi ils ont choisi un Maître qui décide pour eux. Un Maître qui les berce d'illusions, qui leur cache le véritable problème de notre société.

Marquant une brève pause, il reprend avec une assurance réconfortante, éludant une partie de la question sciemment :

Que le peuple soit sur ses gardes, mais qu'il se rassure. Le gouvernement a pris toutes les mesures nécessaires pour limiter les actions de Voldemort et des siens. Tout comme il le fait pour les autres menaces qui planent sur le quotidien sorcier.

Nathaniel savait qu'il était la cible numéro un de "Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom". Parce qu'il avait pris la place de Ministre de la Magie mais aussi et surtout parce qu'il était un hybride. Il s'attendait donc à une tentative quelconque de la part du sorcier, et s'il la provoquait, cela ne lui servirait qu'à clore le dossier plus rapidement.

Pendant ce temps, le journaliste avait croisé les bras et s'était pris le menton entre des doigts aux ongles rongés.
Voila des déclarations qui pourraient avoir de l'éclat, présentées comme il faut. Ou l'allure des divagations d'un fou, si l'approche était tout autre. A Christian de choisir ce genre de détail.
Quoi qu'il en soit, le message au bon peuple était clair. Un autre point intriguait Malloy:

Quel genre de message souhaiteriez-vous faire passer à Vous-savez-qui? Attirer son attention vers, et je vous cite, "le véritable problème de notre société" ou tout bonnement l'écarter du jeu?

Nathaniel considéra la question un instant, dans l'hésitation. Deux de ses doigts vinrent se frôler lentement, alors qu'il restait muet. D'un geste leste, il reposa sa main sur l'accoudoir, son oeil revenant se fixer dans celui du journaliste.

Voldemort a l'attention braquée sur le problème dont je parle. Je dirais même qu'il est au centre de sa démarche.
Cela étant, il se sert de moyens détournés pour parvenir à ses fins. Il utilise la pureté de sang comme excuse pour éradiquer une population qu'il ne connait pas et qu'il craint.
Il n'est pas de message que je puisse adresser à cet homme car il n'est pas dans une optique d'écoute.

Barker releva le visage, démasquant une partie de sa cicatrice. Son regard était sans appel.

Voldemort sera détruit, et ses mangemorts avec. Voilà la seule certitude que je peux vous apporter aujourd'hui.

Le Ministre savait que la tâche ne serait pas facile, cependant, il en faisait une priorité quasi personnelle et comptait la mener à bien coûte que coûte.

Un instant, le journaliste resta à plisser les yeux, tentant de distinguer le discours de politicien des intentions de l'homme. Forcé d'admettre son échec en la matière, Christian se rabatit sur du concret:
et quel est donc ce problème en question...?

Et voila que le tout était accompagné d'un petit sourire idiot et d'une inclination de la tête parfaitement provocante.

Barker émit un rire léger, destiné à faire comprendre que cette question venait à retardement. Joignant ses deux mains comme s'il s'apprêtait à y poser le menton, il déclara, presque joueur :

Celui du secret, mon cher.

Puis il se mordit doucement un bout de lèvre, comme si le goût du mystère s'y cachait. Par cette attitude aussi provocante qu'infantile, il cherchait à déstabiliser son interlocuteur, opérant avec les différentes facettes qui faisaient de lui cet être qu'on aimait à qualifier "d'insaisissable".

Le sourire difficilement dissimulé alors qu'il baisse le visage, le journaliste se réjouissait au plus haut point, en passe d'éprouver un peu d'admiration pour l'homme qui se trouvait en face de lui.
Jouant avec sa lèvre inférieure comme une jeune femme sous le charme, il finit par relever les yeux sur le ministre.

Je serais curieux d'entendre vos développements sur le sujet.

Les lèvres de Nathaniel s'étirèrent en un sourire énigmatique. D'une voix proche du murmure, au timbre doux et grave, il répondit :

Je n'en doute pas.
Mais il est trop tôt. Chaque chose viendra en son temps.

Toujours joueur, et afin de lui renvoyer une balle saisie peu avant, il ajouta en redressant le visage, presque hautain :

Si votre article me convient, n'ayez crainte, vous aurez de nouveau droit à l'honneur de me poser la question.

Il pencha légèrement le visage, insinuant toute l'ironie présente dans sa phrase.

Se contentant d'un simple grognement à peine distinct, l'homme se renfonça dans son fauteuil, dépité.

Vous avez donc un plan d'action bien défini.
Quelle est la première étape après celle de la prise de fonction et de toutes les mises au point nécessaires?

Il sourit.

En ce qui me concerne ? L'éducation, sans doute. C'est du moins la direction que j'envisage pour l'instant.

Christian se contenta d'hausser un sourcil interrogatif.
Depuis quand fallait-il faire parler les politiciens?! Ce Barker était coquet comme une femme.

Ne vous arrêtez donc pas en si bon chemin.